Borderline: Votre roman « Un chœur d’enfants
maudits » a été publié en France. Il s'agit de votre première publication.
Pouvez-vous nous parler un peu de ce livre ?
Tom Piccirilli : « Un chœur d’enfants maudits » est,
à la base, un roman original très noir avec des passerelles étranges entre le
surnaturel et la singularité.
Il raconte essentiellement l'histoire d'une ville à
proximité des marais du sud appelée Kingdom Come où la seule industrie
spécialisée dans la distillerie d’alcool est une grande usine appelée le
Moulin. Le propriétaire du Moulin est le résident le plus riche de Kingdome
Come. Connu seulement sous le prénom de Thomas, il est le tuteur de ses trois
frères siamois, unis par le front. Il doit agir contre toutes les différentes
attaques surnaturelles pesant sur la ville. On dénombre des sorcières qui vivent dans le marais, faisant
éclater des tempêtes, des tueurs mystérieux, des fantômes et son meilleur ami,
un prédicateur, dont le pouvoir le dépasse souvent en lui faisant parler
plusieurs langues. Comme je le signalais, en plus d'être mystérieux, le conte est
agrémenté d'éléments noirs et il y a beaucoup d'humour et de satire sombre.
B : Auteur de plus d'une douzaine de romans et
lauréat à quatre reprises du Bram Stocker Award, pouvez-vous nous parler de
vous ?
T.P : J'ai commencé à publier des histoires d'horreur
il y a un peu plus de vingt ans désormais et ai vendu mon premier roman peu de
temps après avoir terminé mes études à l'université. Pendant les quinze
dernières années j'ai publié des thrillers, des westerns, des romans d'horreur
occulte et des romans de suspense, incluant The Deads Letters, Headstone City,
November Mourns, The Night Class, A Lower Deep, Hexes, et très bientôt un
thriller The Midnight Road. Le prix Bram Stoker est remis chaque année par
l'association des écrivains d'horreur pour le travail accompli dans un certain
nombre de catégories, incluant le Roman, la Nouvelle, le Recueil, l'Anthologie, la Poésie, etc. J'ai été
honoré de recevoir quatre de ces récompenses durant ma carrière, pour mon roman
« The Night Class », ma nouvelle The Misfit Child Grows Fat on Despair, mon
premier recueil de poésie Student of Hell et pour l'anthologie de poésie que
j'ai éditée The devil's wine, qui contient des poèmes d'écrivains tels que Stephen King, Peter Straub, Ray Bradbury, Jack Ketchum,
Graham Masterton et beaucoup d'auteurs tout aussi importants.
B : Y a-t-il une raison pour laquelle la
littérature fantastique vous attire ?
T.P : La vie est simplement trop pleine d'étonnement,
de singularité, de bizarrerie et d’étrangeté pour pouvoir être complètement
capturée par quoi que ce soit, si ce n’est la littérature fantastique. Je suis
plus intéressé par l'essence mythique de la vie. C’est pour moi la vérité
réelle de notre monde. La magie de cela, le mystère de cela. Plus on essaye
d’écrire sur l'esthétique ou la beauté ou l'étonnement ou des frustrations
profondes et la grande douleur de l’existence, plus on est conduit dans le
royaume du fantastique. Il n'y a simplement aucune autre façon pour tenter
d'englober l'énormité et la splendeur de la vie. Comme un enfant, cet
étonnement a toujours été une puissance créatrice pour moi. J'ai toujours eu un
besoin d’imaginer et c'est dans cette direction que mes fantaisies
m’entraînent.
B : Où trouvez-vous votre inspiration ?
T.P : Partout. Dans tout. Dans les grands et petits
détails du monde. Étrangers, amis, famille. Dans les films, la littérature, la
musique, mon passé, une promenade dans le parc. Un artiste ou un individu
créateur de n'importe quelle forme artistique se doit d'être ouvert, réceptif à
tout. Cela peut parfois être douloureux de traverser la vie de cette façon,
mais de cette douleur et dans nos joies nous découvrons quelles sont nos
valeurs et quel sens peuvent avoir nos vies pour nous.
B : Pouvez-vous nous dire à quoi ressemble un jour
dans la vie de Tom Piccirilli ?
T.P : Bien que quelques auteurs soient très
disciplinés et puissent travailler plusieurs heures par jour, j'ai besoin de
beaucoup plus de souplesse. J'écris par petits bouts durant la journée. Entre
vingt et trente minutes à mon bureau à n'importe quel moment de la journée. Je
peux alors prendre le temps d'aller lire ou regarder un film ou encore promener
mes chiens dans le quartier. Quand j'ai terminé, je retourne à nouveau
travailler. Ainsi, je peux aller rendre visite à des amis ou passer mon temps
sur internet pour répondre à mes mails. Après quoi, j'écris un peu plus. C'est
la seule façon pour moi de m'impliquer dans mon travail sans stresser.
B : La religion et la sorcellerie sont des éléments
très présents dans votre roman, y a-t-il des raisons à cela ?
T.P : Si vous retournez plusieurs milliers d'années en
arrière, à la source du système de croyance d'une culture, vous découvrez que
la mythologie, l'archéologie, le folklore, la religion, la loi morale et la
sorcellerie mènent tous au même endroit. J'ai toujours été fasciné par le
changement des croyances au fil des siècles, la façon dont le mythe est
considéré comme une réalité, comment les grandes religions du monde proviennent
de la même rivière et élèvent maintenant des ennemis mortels. C'est déchirant,
fascinant et irritant. J'ai voulu mettre dans le roman toutes mes
interrogations concernant la nature des croyances et la foi, les batailles, le
besoin qu'a l'homme de trouver Dieu. Et dans l'effort de trouver Dieu, comment
il se trouve souvent, ou se perd lui-même.
B : L'influence du père sur le héros, mais aussi
sur la ville parce que le fondateur de Kingdom Come est un symbole fort dans
votre roman, le rapport avec la paternité et la disparition de personnes
importantes forment et construisent la vie du héros, pouvez-vous nous expliquer
les raisons de ce choix ?
T.P : L’essentiel de mon travail se concentre sur le
thème du héros lequel doit gérer des incidents variés en rapport avec son
histoire personnelle. Mon propre père est mort quand j'étais très jeune et le
fait qu'il n'a pas été présent une partie de ma vie est quelque chose qui
continue de m'influencer. Parce que j'ai très peu connu mon père, il est devenu
une sorte de mythe pour moi, inchangé, mais omniprésent. Mes personnages ont
affaire à cela également dans leur propre vie. L’absence de leurs parents a
d’une manière ou d’une autre une répercussion sur leur évolution.
B : Votre dernier livre « The midnight road », « la
route de minuit » sortira en juin prochain, pouvez-vous nous en dire quelques
mots ?]
T.P : L
a route de minuit est un mélange original de crime
et de surnaturel, qui décrit les aventures d’un enquêteur du service de
protection de l’enfance qui meurt congelé dans un port mais est par la suite
ressuscite. Il passe le reste du roman chassé par un tueur évasif et communique
avec le fantôme d'un chien mort doté de paroles qui pourrait ou ne pourrait pas
être l'ange de la mort. C'est principalement un roman psychologique avec du
suspens, et probablement mon roman le plus « noir » jusqu'ici.
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